J'étais comme d'habitude l'un des derniers à rester aussi tard au bureau. Soufflant en voyant l'heure avancer alors qu'il me restait encore une tonne de travail, je finissais par éteindre mon PC et ranger mes dossiers avant de prendre ma veste et quitter les lieux. Le ménage avait été fait, je pouvais donc mettre l'alarme à mon étage avant de saluer les gardiens qui passeraient la nuit à surveiller la tour et sortir dans la rue. Montant dans ma voiture, je m'apprêtais à démarrer quand mon téléphone se mit à vibrer. Quelques collègues m'invitaient à les rejoindre au McCaffety's histoire de bien terminer la journée. Pourquoi pas. Ne prenant pas la peine de répondre, je démarrais la voiture et prenais alors la route vers le dit bar. L'esprit bien ailleurs.
Cela faisait des jours et des jours que j'étais assaillis de mail, SMS et autres lettres, de la part de la famille Colacurcio. Puissante famille mafieuse présente en ville depuis des années qui ne faisait pas vraiment parlé d'elle, voilà que depuis plusieurs jours maintenant ils commençaient à bouger et à agir de façon à ce que les habitants de la ville prennent conscience de leur présence. Au départ, j'avais été plutôt surpris d'être contacté par ces derniers. Ne sachant pas trop ce qu'ils me voulaient, ne prenant même pas conscience au début qu'il s'agissait d'une famille plongées dans des activités illégales. C'est après avoir reçu leurs demandes que j'ai commencé à me renseigner sur eux et autant dire que la peur s'est rapidement installé. Sans parler de la fois où je déjeunais en paix sur la terrasse d'un petit restaurant et que le chef lui-même s'était déplacé pour venir à ma table. Me faire ses propositions en direct. Je peux vous dire que vous retrouver entourés par des hommes armés n'aidait pas forcément à ce que j'agisse de la manière la plus naturelle possible.

Depuis ce jours, mes déplacements en ville se faisaient toujours avec une certaine boule au ventre. C'était devenu limite naturel de regarder par dessus mon épaule quand je me déplaçais dans la rue. Pour vérifier que personne n'était entrain de me suivre. Lorsque je conduisais comme maintenant, je faisais de long détour pour être aussi sûr de ne pas être suivit. Même si je savais au fond de moi que les Colacurcio savait exactement où je vivais. Ils devaient même connaître pas mal de chose sur moi et mon entourage dont je n'avais pas idée.
Ma route pour rejoindre mes collègues au bar prenait donc plus de temps que prévu. Mais après une bonne trentaine de minutes, j'arrivais enfin sur les lieux. Prêt à boire quelques verres et à m'amuser. Ma vie n'allait certainement pas s'arrêter là parce que le chef d'une famille mafieuse m'ordonnait de travailler pour lui. Ouais... dis comme ça ce n'était pas rassurant. Et de ce fait, après avoir salué les collègues, j'enchainais déjà avec deux shot de vodka cul sec. Histoire de bien se mettre dans le bain et rattraper le temps perdu. J'enchaînais encore deux autres verres avant de payer une tournée générale. Le bar s'esclaffa à l'unisson et quelques personnes venaient même me mettre une tape amicale dans le dos. Le sourire me revenait et les quelques problèmes que j'avais disparaissaient comme par magie. Le reste de la soirée s'annonçait plutôt pas trop mal. La fête battait son plein, l'alcool coulait à flot et les filles se déchainaient de plus en plus sur la piste.

Cependant, après plusieurs minutes j'apercevais un visage quelque peu familier sur le palier de la porte. Ce dernier me regardant avec insistance avant de me demander de le suivre d'un geste de la main. Essayant de faire comme si je ne l'avais pas remarqué, ce dernier resta sur place en me fixant avant de me demander de nouveau de le suivre à l'extérieur. La soirée se passait que trop bien il fallait le croire. Soufflant, prenant un dernier verre que je finissais rapidement, je m'éloignais de mon petit groupe et sortais l'air de rien à l'extérieur du bar. Je remarquais l'homme, entouré de deux autres un peu plus loin dans la rue et les rejoignais alors tranquillement. Me demandant ce qu'ils voulaient même si j'avais une petite idée derrière la tête.
"Monsieur Crawford. Vous savez certainement ce qui nous amène ici n'est-ce pas ?" Demanda alors l'homme sans réellement attendre de réponse. On pouvait reconnaître son accent italien à des kilomètres à la ronde. "Monsieur Colacurcio n'est pas un homme que je qualifierai de très... patient. Voyez-vous, cela fait des jours maintenant qu'il attend une réponse de votre part concernant son offre. N'ayant rien reçu, il nous a donc envoyé collecter cette réponse directement." J'écoutais sans rien dire, essayant de paraître droit et fier alors que je déglutissais difficilement. Les deux colosses entourant ce dernier n'avaient pas l'air très commode et même lui avec son visage plutôt sympa et son sourire n'annonçait rien de bon.

Regardant rapidement autour de moi, je ne voyais pas comment me sortir de cette mauvaise passe. Mais fier comme je l'étais, je ne perdais pas courage et annonça alors directement cette réponse que j'avais tant redouté à donner. "Dites alors à votre patron que sa proposition ne m'intéresse pas et que je ne me salirai jamais à suivre les ordres d'une raclure." Tout en souriant doucement. Putain Damian tu ne peux pas la fermer parfois au lieu de dire ce que tu penses ? Quoi qu'il en soit, le message avait l'air d'être passé et sans attendre quoi que ce soit de leur part, je tournais les talons et partais en direction du bar pour continuer ma soirée. Grossière erreur... Ne jamais tourner le dos à ce genre d'individus... Je sentais rapidement deux poignes m'attraper par les bras et me soulever de terre pour me jeter contre le mur. Le choc fut assez violent, ma respiration se coupa pendant plusieurs secondes. Je relevais à peine le visage pour voir qui avait agit qu'un puissant coup s'écrasa sur ma joue. Ma tête tourna alors violemment sur le côté, mon visage cognant le mur et mes cervicales craquant sous la violence du coup. Putain... ma tête tournait. Un goût de fer se précipita dans ma bouche et du sang en jaillit même quelques secondes après. D'autres coups s'abattaient sur moi sans que je ne puisse rien faire. Ne sachant pas où ils allaient cogner et n'ayant pas la force de me protéger avec ce que je venais de recevoir. J'avais l'impression que cela faisait des heures qu'ils se déchainaient sur moi jusqu'à ce que tout s'arrête subitement. Les yeux gonflés et limite fermés par les coups reçu, je regardais tout de même l'homme s'avancer et s'agenouille face à moi pour être à ma hauteur. "Voyez-vous, on ne refuse jamais un ordre de monsieur Colacurcio." Sur ses mots sa main s'abaissa subitement et une intense douleur à la cuisse m'arracha un profond cri de souffrance. Quand il retira sa main je vis avec effroi un couteau planté dans ma cuisse. "Prenez ceci comme un premier avertissement et une seconde chance de réfléchir plus attentivement à notre proposition. Vous avez une semaine pour nous donner votre réponse définitive monsieur Crawford." Un sourire sadique se dessinait sur son visage et on voyait clairement que ce dernier était en extase de voir autant de sang et de douleur. On sentait qu'il pouvait en faire plus. Qu'il désirait en faire plus mais qu'à contre coeur il se retenait. Dans quelle merde m'étais-je encore mis...